Le flambeur

Lorsque le nom de James Caan est mentionné, de nombreux cinéphiles pensent à son interprétation de Sonny Corleone dans Le Parrain. D'autres se rappellent de lui comme Paul Sheldon, l'auteur dans Misery, sorti en 1990.

Un rôle marquant de Caan que peu de gens évoquent est celui d'Axel Freed dans Le Flambeur de 1974. C'est regrettable, car ce personnage permet à l'acteur d'explorer une belle palette d'émotions, illustrant à quel point les êtres humains peuvent être complexes.

Nous faisons la connaissance d'Axel dans une maison de jeux privée où il parie de grosses sommes et les perd toutes. Rapidement, nous découvrons qu'il a accumulé une dette de 44 000 $ (soit environ 281 000 $ en 2025) et qu'il peut quitter l'endroit indemne uniquement parce qu'il entretient d'excellentes relations avec son bookmaker, Hips (Paul Sorvino).

Après cette introduction rapide, on ne peut guère blâmer les spectateurs de penser qu'Axel n'est qu'un joueur irréfléchi, inconscient des problèmes qu'il s'est créés. Nous avons un premier indice que ce héros est en réalité très intelligent lorsqu'il arrive dans une université pour enseigner la littérature. Axel prouve qu'il connaît bien son sujet en analysant l'œuvre de Dostoïevski et en lançant un défi à sa classe avec l'idée d'un homme transformant une croyance — peu importe à quel point elle peut être éloignée de la réalité — en fait par la seule force de sa volonté.

Réalisé par Karel Reisz d'après un scénario de James Toback, Le Flambeur est un exemple de la sophistication du cinéma américain des années 70. Axel Freed n'est pas un personnage formaté : il est tantôt un académique brillant, tantôt un amant charmeur, un preneur de risques imprudent et un fils affectueux. En d'autres termes, c'est une personne vivante et authentique, pleine de qualités admirables mais aussi de compulsions sombres et inévitables.

Ce qui rend Axel si captivant, c'est qu'il est non seulement intelligent, mais qu'il est également conscient de ce qui le pousse à jouer. Il aime gagner, mais seulement lorsque la menace de la perte implique du danger. Cet enseignant a besoin que son existence même soit en jeu pour que ses prises de risque soient à la fois significatives et enrichissantes. Axel sait évaluer les probabilités et à quel point la plupart de ses paris sont imprudents, mais mettre tout en jeu comble un vide dans sa vie, ce dont il a besoin, même s'il connaît parfaitement les conséquences d'une éventuelle défaite.

James Caan est fascinant dans le rôle d'Axel Freed. Il incarne un homme de conviction et de détermination, conscient qu'il doit jouer, peu importe les risques que cela fait peser sur lui et ses proches. Caan ne dépeint jamais l'addict comme un homme désespéré, mais choisit plutôt de montrer Axel comme quelqu'un qui se laisse emporter par le moment, se concentrant sur l'excitation de prendre des risques avec sa vie sur un résultat incertain.

Quand nous voyons l'enseignant à son poste, Caan est totalement convaincant en tant qu'éducateur engagé et cultivé. L'acteur réussit à faire croire qu'Axel est passionné par la littérature et qu'il souhaite que ses étudiants apprennent. Caan dégage l'autorité de quelqu'un qui maîtrise son cours et sait orienter les esprits jeunes vers des horizons choisis, même lorsque ses élèves contestent ses idées.

Dans Le Flambeur, James Caan offre une performance variée et marquante, ancrant dans les mémoires la complexité d'Axel Freed. Quand les spectateurs découvrent ce personnage imparfait et totalement humain, ils réalisent à quel point la plupart des personnages de films sont souvent superficiels et peu profonds. Ce film réalisé par Karel Reisz est un autre exemple de la richesse du cinéma américain des années 70 et mérite d'être redécouvert comme l'un des véritables joyaux de cette époque.

Note : 8,5/10 ; Visionné sur BD le 10 janvier 2025.

RÉALISATEUR KAREL REISZ + ACTEUR JAMES CAAN + SCÉNARISTE JAMES TOBACK, UN TRIO D'EXCEPTION QUI COLLABORE SUR UN VRAI BON FILM, UN TRÉSOR SOUS-ESTIMÉ DES ANNÉES 1970.

James Caan est inoubliable dans LE FLAMBEUR, une analyse tendue d'un professeur d'université (à New York) qui ne peut tout simplement pas s'arrêter de jouer, peu importe à quel point la situation se dégrade et combien il doit à la mafia. Le film est essentiellement une étude de personnage, l'une des meilleures jamais réalisées à Hollywood, sans doute la performance la plus marquante de James Caan. C'est presque criminel qu'il n'ait pas été nommé aux Oscars pour ce rôle, mais il a tout de même reçu une nomination pour un Golden Globe pour son travail exceptionnel. L'ensemble de la dramaturgie du film est exceptionnel dans cette oeuvre troublante du talentueux Karel Reisz. Il faut également saluer un superbe casting de soutien comprenant de nombreux grands noms, tels que Paul Sorvino, H. Emmet Walsh, Vic Tayback et les nominés aux Oscars Burt Young et James Woods, parmi d'autres personnalités illustres.